Gustave Doré,l’imaginaire au pouvoir
Exposition au Musée d’Orsay, du 18 février au 11 mai 2014par Mme Sandrine Faucher, historienne de l’art, Conférencière Nationale.
Gustave Doré, un génie incompris.
Trente ans que Gustave Doré (1832-1883), illustrateur célèbre pour avoir mis en images des textes fondamentaux comme la Bible, et les plus grands auteurs : Perrault, La Fontaine, Rabelais, Dante, Shakespeare, Cervantès … n’avait pas eu droit à une rétrospective digne de ce nom. Un préjudice aujourd’hui réparé par le musée d’Orsay, qui met le met à l’honneur.
« Il a marqué de manière durable et indélébile l’imaginaire collectif, souligne Philippe Kaenel, commissaire scientifique. Des réalisateurs se sont réclamés de lui : David Lean, Cecil B. DeMille, Roman Polanski, Tim Burton, Terry Gilliam, Peter Jackson. Mais ce qui lui a valu une gloire internationale a provoqué son drame. » Car ce contemporain de Manet nourrissait une ambition secrète : être reconnu pour sa peinture.
Caricaturiste au trait incisif, précis et virevoltant.
L’exposition dévoile la face cachée de Gustave Doré à travers un ensemble de 200 œuvres. « Il souffrait d’accès de mélancolie et de paranoïa. Il avait des pulsions de mort, se représentant en génie poignardé, vieux ou pendu. Toute sa vie, il a voulu gravir les échelons, mais est resté un outsider. Doté d’une curiosité technique hors du commun, ce dessinateur remarquable s’est essayé à l’aquarelle, l’huile, la gravure, la lithographie et la sculpture en autodidacte. Quand il fallait se spécialiser sur le marché de l’art, il était touche-à-tout, ce qui lui a été reproché. Son travail brillait par sa diversité et sa complexité. »
Le caricaturiste au trait incisif, précis et virevoltant a évolué depuis ses débuts avec Honoré Daumier, exécutant des paysages, des scènes allégoriques, religieuses et historiques. Il privilégie des compositions monumentales, comme Le Christ quittant le prétoire (1876-1883), une toile de 7 mètres sur 4 prêtée par le musée des Beaux-Arts de Nantes. D’autres pièces viennent des États-Unis et d’Angleterre, où Gustave Doré avait ouvert une galerie. « Il menait une existence mondaine intense, fréquentait le gratin (Rossini, Wagner, Offenbach), sortait avec courtisanes et actrices (Sarah Bernhardt). Cet acrobate marchait sur les mains pour épater ses convives. Ce qui déplaisait prodigieusement aux frères Goncourt, qui le trouvaient trop exhibitionniste.
Source : Stéphanie Belpêche
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